Plovezan
« Conversion dans le marron va au carton ! », voici le nouveau slogan inventé par Stéphanie lors de cette belle sortie dans le Beaufortain. Signification ? Il est trop tôt pour l’écrire car il faut bien aguicher (synonyme de « faire du teasing » dans le Larousse) la lectrice et le lecteur exigeant.e si l’on veut que la page de l’article soit ouverte et que la suite soit lue ! Par ailleurs cette sortie fut plein de rebondissements et de séquences palpitantes. Enfin des choses ont été dites sur certain.e.s Gumistes et plusieurs rumeurs ont courues. Ici je vous demande une petite pause, je publie l’article tel quel et je vérifie qu’à partir de ce passage on est bien obligé d’ouvrir l’article pour en connaître la suite. C’est bon. On va pouvoir commencer. C’est que Bruno nous rémunère – chichement – aux nombre de clics sur la page principale de l’article. Et rien n’est de trop. Les temps sont durs et on a deux minettes à nourrir.
Après ce préambule il faut relater l’introduction un brin martial que le Caporal Bert(-rhan !) propose à la cohorte embarquée dans cette aventure: il s’agirait là d’une « conquête », notre « section » devant partir à « l’assaut » de la montagne pour la « vaincre ». Foin de « prompt renfort » cette fois-ci, nous serons seuls face à la nature hostile, au vent et au froid.
Pont de la Gîte, nous sommes partis, Caro, Philippe, Emmanuel, Freddy et les deux protagonistes déjà susnommés. Jamais vu autant de bagnoles au parking et aussi peu de neige. Signes des temps.
Mais nous pouvons chausser les skis immédiatement et la suite vaut le détour.
Nous visons tout d’abord la Chapelle Saint Guérin et une question surgit : qui est ce saint à qui on a dédié de part et d’autre du massif un lac et une chapelle (0) ?
Ensuite c’est plat. Et potentiellement trèèès long. Le vallon de l’Ormente que nous remontons permet de rejoindre le refuge de la Balme puis plus haut celui de Presset et un nid de belles balades. Mais il est mille fois préférable de le descendre en ski que de se dessécher à le remonter. Heureusement nous bifurquons pour aborder une pente orientée S-O qui nous offre une progression beaucoup plus rentable en terme de dénivelée (1); d’ailleurs on fixe les couteaux dès le départ.
Caro nous mène à un rythme régulier via une trace dont la perfection épouse celle de la montagne. Le panorama se dégage et la Pierra Menta se découvre. Souvenir de la Bérard Rigotti (2) avec Stéphanie : arrivés en haut j’avise deux points pour poser un relais ; l’un deux, un piton apparemment aussi âgé que moi, me semble mériter un contrôle. Je le prends entre le pouce et l’index et n’ai qu’à faire mine de tirer pour qu’il me reste dans la main ! Silence. On commence à mater aux alentours pour découvrir un superbe relais étincelant à spit & Co. J’ai gardé le piton comme objet de déco. Et comme souvenir de certaines précautions à prendre avant d’exposer la barbaque en montagne.
Nous atteignons le Crux de l’itinéraire, le fameux « ressaut vers 2000 m » mentionné dans les topos. Diverses options se discutent et nous abordons finalement l’affaire par un côté qui prend le soleil depuis quelques instants déjà. Deux avantages – à pente égale : neige un peu plus tendre et psycho plus chaud. Quoiqu’il en soit cela se raidit encore un peu et c’est exposé. On ne voudrait pas qu’un.e de nos soldats (on rappelle que c’est la guerre) se crispe et brûle trop d’énergie. Décision est prise (sans équivoque et un chouilla « top-down » c’est vrai mais il y a des moments où la bataille impose les choix) de mettre les crampons. Skis sur le sac on se sent plus lourds mais avec les crabes on avance sans peur et sans heurt jusqu’au replat.
Régler (la veille je précise), mettre et user des crampons : une première pour Emmanuel. Nous fêtons ça dignement au génépi maison de Stéphanie ! Suis-je bête (ne répondez pas, merci), j’allais oublier qu’entre temps nous gravissons encore.
C’est l’assaut final. Nous apercevons encore le camp V en contrebas mais toute retraite est désormais impossible; en effet nous portons l’honneur du Gums tout entier et notre sens aigüe du devoir nous guide vers un insubmersible succès. « L’issue est vers le haut » (3). Le chemin n’est rien, seule la victoire compte !
La pente se raidit à nouveau sous le sommet. Le regel fut très bon cette nuit mais la neige prend le soleil depuis ce matin sur cette face plein sud et elle commence à bien transformer. Or certains endroits sont couverts de ce sable de sirocco qui a touché les Alpes quelques semaines plus tôt. Cela crée des zones maronnasses qui, outre leur couleur particulière, présente la nette caractéristique de décailler plus fort. Dans la pente cela donne une neige dans laquelle les carres et les couteaux ont moins prise. Stéphanie l’apprend à ces dépends lors d’une conversion et elle en tire cette leçon imparable :
« Conversion dans le marron va au carton ! »
Mais il nous en faut plus pour nous déstabiliser et nous dévier de notre mission : nous atteignons l’antécime de Plovezan à 12h58 heure de Bourg-Saint-Maurice.
La descente est un régal dans une moquette à poils mi-longs – soyons précis. Le vallon de l’Ormente retrouvé nous choisissons de le redescendre par la rive droite et c’est la bonne option.
Tout cela n’était qu’une bataille ; l’essentiel est encore devant nous : trouver un coin sympa pour se poser et boire un coup. L’affluence au parking nous pousse à fuir les lieux et la chance des bienheureux nous offre un endroit fort sympathique dans un des hameaux sur ce versant Sud de la Tarentaise, deuxième plus belle vallée du monde (4). C’est la victoire finale et elle est magnifiquement récompensée par les cookies à Freddy et le gâteau à l’orange de Mamie Casteu – version Stéphanie.
Ce qui me vaut l’honneur de rédiger ce compte-rendu ? Le port du casque ! Si. La rumeur prétend que cela ne s’est jamais vu, ce qui est pur mensonge; j’ai fait appel mais il n’est pas suspensif. Donc je m’acquitte. Le sens de l’honneur sans doute… à moins que ce soit l’envie d’écrire quelques balivernes 😊
Merci à toute l’équipe ; c’était un bien beau moment avec vous.
Notes :
0 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gu%C3%A9rin_(%C3%A9v%C3%AAque_de_Sion)
1 : « Ce mot est apparu d’abord au féminin, répertorié au 20ieme siècle ainsi par les différents dictionnaires, puis l’usage a évolué et l’emploi du masculin est devenu pour ainsi dire général.
Cependant, la forme féminine pour ancienne qu’elle nous paraisse reste possible »
2 : https://www.camptocamp.org/routes/54185/fr/pierra-menta-berard-rigotti
3 : copyright L’Amiral 2021
4 : la première ? Demandez à Elena !
Ah quelle plume !
Comment cela il y avait du monde chez vous ???? Ah, mais vous étiez en Tarentaise… Non mais quelle idée ! ^^
C’est un truc de dingue: CR publié à 22h03 et commentaire d’Elena à 21h05… La Maurienne a son propre fuseau horaire !
Je suis venue, j’ai vu, j’ai vaincu, j’ai bu.
Belle trouvaille que cette balade.
Bien belle sortie !
Super neige du début à la fin !!
Merci Caro et Bert-Rahan (ça fait encore plus guerrier ) !
En plus tu fais le compte rendu, y a vraiment plus de respect (d un autre côté, c est si bien fait )